L’ostéopathie animale s’installe de plus en plus dans le secteur de la santé animale avec un développement rapide et la naissance de nouveaux centres de formation chaque année. Les étudiants aussi s’organisent. Focus !
Mégane Beaucamp, fraichement élue présidente de l’Union Française des Étudiants Ostéopathes Animaliers (UFÉOA), pose le décor : «il a fallu s’organiser rapidement pour que notre profession puisse continuer d’exister». Continuer d’exister? En 2011, Bruno Le Maire, à l’époque ministre de l’Agriculture, fait craindre le pire aux ostéopathes animaliers. En prenant appui sur la loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche, le conseil des ministres par voie d’ordonnance décrète les actes d’ostéopathie animale comme relevant de la médecine et de la chirurgie des animaux. En clair, cela signifie qu’ils ne sont réalisables que par les vétérinaires.
La réaction ne s’est pas fait attendre et les ostéopathes animaliers non vétérinaires s’organisent et « c’est à ce moment que naissent plusieurs associations comme l’association des Ostéopathes Animaliers Européens», cite en exemple Mégane. L’UFÉOA, qu’elle préside depuis octobre 2020, voit le jour en février 2016 dans un centre de formation de Clermont-Ferrand. Au bout d’une année et demie d’existence, elle se déclare indépendante des centres de formation «nous n’avions pas d’intérêts communs», justifie sa présidente.
Une indépendance essentielle
Sur son site internet, l’UFÉOA affiche fièrement son indépendance dans la présentation de l’association. L’un des objectifs est de pouvoir garder la main sur la vision de l’ostéopathie animale que défend l’association. Mais pas seulement. Les intérêts des uns et des autres n’étant pas les mêmes, il s’agit également de défendre au mieux sa paroisse. Pour les centres de formation par exemple, l’objectif est avant tout d’attirer un maximum d’étudiants dans des formations qui restent très onéreuses. Pour les cinq années de formation qu’exige le diplôme, il faut compter entre 40000 et 50000 euros. Par ailleurs, les bourses sur critères sociaux ne sont pas accessibles aux étudiants. Il reste le prêt étudiant garanti par l’État ou les apports personnels pour financer les études. Une poule aux œufs d’or aux yeux de certains centres. Ainsi, en quelques années, leur nombre n’a eu de cesse de croître. Avant 2017, on comptait seulement huit centres de formation en France, mais en deux ans, la situation a largement évolué. En 2020 on comptait 19 centres de formation, ils seront 20 d’ici un an, 22 si on compte ceux de Bruxelles et Barcelone accessibles aux étudiants français. Une croissance qui ne réjouit pas l’association. «C’est une de nos prin cipales préoccupations, car cela ne prend pas en compte la capacité d’absorption du terrain», s’inquiète-t on du côté de la présidence. Le risque est de voir une saturation du marché de l’emploi sur le moyen terme. Étudiante en troisième année, Mégane estime qu’il y aura «400 étudiants qui seront formés chaque année à partir de 2025». Avant de regretter que « certains centres de formation ne prennent pas en compte cette réalité et restent flous sur l’examen d’aptitude requis pour exercer en toute légalité». Plus étonnant encore, « un centre, à notre connaissance, encourage même à ne pas passer cet examen ». Suite au décret n° 2017-573 du 19 avril 2017, relatif aux compétences exigées des personnes réalisant des actes d’ostéopathie animale, toute personne voulant exercer les dits actes doit passer un exa men d’aptitude sous l’égide du Conseil National de l’Ordre des Vétérinaires (CNOV). Ce dernier tient ensuite le Registre National d’Aptitude (RNA) des personnes autorisées à exercer.
Un moratoire, le temps de se mettre en conformité, avait été décidé, mais il a pris fin le 31 décembre 2019. Pour ce qui est de la régulation du nombre de praticiens, le CNOV botte en touche. Jean-Pierre Pallandre, Vice-président chargé de la question au Conseil Régional de l’Ordre des Vétérinaires en Auvergne-Rhône-Alpes, justifie « cela ne fait pas partie de nos prérogatives, nous sommes dans la phase de mise en conformité des professionnels». Si les relations entre ostéopathes animaliers et CNOV n’ont pas toujours été au beau fixe, les choses tendent à s’améliorer. Du côté de l’UFÉOA, on en fait même un cheval de bataille.