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RETROSPECTIVE #2 Ostéopathie et endocrinologie main mise sur les hormones

Aborder la question de l’influence de l’ostéopathie sur la régulation hormonale est plus difficile qu’il n’y paraît. Comment imaginer l’efficacité de cette action thérapeutique et quelles sont les prises en charge qui en découlent. Décryptages.

Une enquête réalisée par Reza Redjem-Chibane.

Les dérèglements hormonaux sont aujourd’hui une question de santé publique à travers la problématique grandissante des perturbateurs endocriniens. Une problématique qui traverse toute la société depuis la responsabilité des industriels et des institutions sanitaires, jusqu’au corps médical en passant par les préoccupations des futures mères.

Après avoir assisté à une conférence sur les perturbateurs endocriniens, Valérie Namer, ostéopathe DO, titulaire d’un doctorat en médecine et d’un DES en endocrinologie et métabolisme, se disait « très heureuse d’entendre parler de globalité au cours de cette conférence qui ne réunissait pas uniquement des médecins ». À cette conférence, étaient présents des professionnels du contrôle qualité des eaux de Lyon, des spécialistes des questions de la contamination de l’eau, etc. « Car la question des perturbateurs endocriniens est aujourd’hui au cœur des préoccupations de la population et les médecins sont très sollicités pour répondre à des questions comme « peut-on boire l’eau du robinet ? Et le corps médical ne sait toujours pas quoi répondre…» relate Valérie Namer. Certains ostéopathes font état de leurs résultats thérapeutiques affirmant agir sur la sécrétion d’hormones. Soit à travers le rétablissement d’une physiologie, comme c’est le cas pour les problèmes d’infertilité. Soit à travers l’arrêt ou la diminution d’un traitement comme le Lévothyrox par exemple, utilisé pour corriger une insuffisance de sécrétion de la glande thyroïde ou son absence. Qu’en est-il réellement ? Quel est le niveau de preuve de l’efficacité de l’ostéopathie dans ces prises en charge ?

COMMENT DIAGNOSTIQUER LES DYSFONCTIONS DU SYSTÈME HORMONAL ?

Il ressort de notre enquête que la première étape pour une prise en charge efficace des troubles endocrines est la connaissance des phénomènes de régulation impliquant le système hormonal. Cette connaissance est primordiale pour déterminer si le système hormonal est réellement impliqué dans les symptômes décrits par vos patients. Et s’il s’agit bien d’une dérégulation hormonale, « il est avant tout important de comprendre comment se mettent en place ces déséquilibres hormonaux. D’abord en identifiant si la cause est centrale : dysfonctionnement de l’hypophyse qui a une action à distance sur les glandes surrénales et les ovaires. Ou si elle est périphérique, c’est-à-dire localisée au niveau des glandes sécrétrices. Ce second cas de figure est le plus courant » nous explique Valérie Namer.

Mais ce n’est pas tout précise l’ostéopathe : « un troisième système doit être investigué : le système immunitaire. »

QUESTIONNER L’ENVIRONNEMENT DU PATIENT, UNE ÉTAPE PRIMORDIALE DU DIAGNOSTIC

Mais pour évaluer les étiologies endocriniennes dans un diagnostic, il s’agit de bien connaître la situation environnementale de son patient. Évaluer le niveau de stress au travail et dans la vie quotidienne, identifier quels changements récents peuvent être corrélés à des signes physiologiques, etc.

Car les conséquences des dérèglements hormonaux apparaissent comme des signes parfois anodins ou à la clinique peu discriminante : fatigue, humeur, surpoids, etc. Ils peuvent par ailleurs affecter le système immunitaire. C’est compliqué à investiguer, mais « ce n’est qu’en posant la question hormonale, qu’on obtient un diagnostic impliquant un ou plusieurs systèmes hormonaux. Car le système hormonal est un système de régulation ”, souligne Valérie Namer.

Cette dernière illustre son propos avec l’exemple suivant : « le surpoids n’est pas intéressant en lui-même en termes de pathologie, car c’est un symptôme. Si l’on s’occupe bien des causes, la perte de poids sera secondaire ».

Ajouté à cela le fait que nous ne réagissons pas de la même manière à des stimuli environnementaux. « Selon sa base génétique, chacun aura un certain capital de résistance au stress. Certains peuvent encaisser des périodes de travail intenses sans souffrir des conséquences liées au stress chronique ”, expose Valérie Namer. Pour mieux comprendre l’enjeu des hormones sur la physiologie humaine, certains vont jusqu’à étudier leur apparition dans les systèmes vivants. Philippe Petit, ostéopathe DO, explore les découvertes des paléontologues pour nous expliquer le rôle fondamental qu’ont joué les hormones dans l’évolution humaine. Il cherche à travers cet angle à déterminer quelle est la réelle action de la main de l’ostéopathe sur les tissus du corps humain. Il part d’un questionnement de Christian Ameisen, professeur-immunologiste : « La limite de nos schémas conceptuels ne détermine pas seulement la nature de nos réponses aux questions que nous nous posons, mais aussi la nature des questions ».

UNE FONCTION GLOBALE ET GLOBALISANTE

Ainsi Philippe Petit remonte le cours de l’histoire pour nous expliquer que « la gestion des émotions a été rendue possible par le développement du cerveau des premiers mammifères (cerveau limbique) il y a 220 millions d’années. L’intégration des émotions donne une place à l’autre grâce à une valorisation hormonale. L’être biologique acquiert alors une dimension de sujet dans ses relations avec les autres et l’environnement parce que les émotions « inondent » tout le corps grâce aux hormones ».

Au fil de son raisonnement il relie l’action ostéopathique aux hormones en se demandant si, « lorsque le soin ostéopathique enlève des « blocages » perçus au niveau intestinal pour agir par exemple sur des constipations ou des diarrhées, est-il de nature organique (action directe sur un intestin) ou hormonale ? » Et de poursuivre : « le caractère éparpillé des hormones est toujours d’actualité chez l’humain. L’ostéopathie n’a pas soigné un déficit d’intestin, mais un déficit de communication corporelle perçue à travers le MRP. Grâce à l’action hormonale sous-jacente au geste ostéopathique, il y a optimisation des fonctions intestinales. La communication fondée sur des hormones ne nécessite pas d’organes : c’est une fonction globale et globalisante ».

LA PUISSANCE DU TOUCHER… MAIS PAS N’IMPORTE QUEL TOUCHER !

Autre vision, celle d’Anne-Dominique Clermont, ostéopathe DO. Elle s’est demandé comment le toucher pouvait être un moyen d’action sur la régulation neuro-hormonale exploitable par l’ostéopathe. À travers une revue de littérature scientifique, Anne-Dominique Clermont détaille les preuves scientifiques qui décrivent tous les avantages du toucher. Depuis ses bienfaits indispensables pendant le développement de nouveau-né, jusqu’à ses effets antalgiques en passant par ses vertus d’attachement maternel. Pour conclure, Anne-Dominique Clermont nous révèle également l’importance de certaines fibres nerveuses amyéliniques afférentes nommées “C-tactile” dans ce processus qui relie toucher et compétence sociale. « La façon de toucher est importante et l’efficacité de l’ostéopathie pourrait être favorisée par la stimulation de ces fibres C-tactiles qui répondent électivement à un toucher doux et lent » expose-t-elle. Avant de relier ces résultats de la recherche scientifique avec la thérapie manuelle : « cette piste est des plus prometteuses pour promouvoir les techniques ostéopathiques fasciale de déroulement ”, conclut Anne-Dominique Clermont.

UNE OPPORTUNITÉ POUR L’OSTÉOPATHIE

À travers le toucher et ses incidences sur le système neuro-hormonal, l’ostéopathie affirme les preuves d’une efficacité certaine. À condition de savoir analyser toutes les composantes qui peuvent avoir une influence sur ce système de régulation qui est aussi notre système de communication originelle, l’ostéopathe pourra affirmer avoir une action sur ce système de régulation particulièrement puissant dont la fonction est de permettre une adaptabilité constante avec notre environnement extérieur et intérieur.

La globalité du système hormonal serait donc une opportunité pour l’ostéopathie d’assoir sa philosophie thérapeutique dans le monde de la santé. Est-ce un raccourci hasardeux… ou une réalité trop évidente ?

La suite du reportage à retrouver dans Ostéomag #37

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