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OSCAR 1 : la recherche ostéopathique en orbite

OSCAR 1 (pour OSteopathic CARe) est une étude ostéopathique originale. Elle a fait partie d’un programme de recherche spatiale de simulation de vie en apesanteur au cours duquel des tests ostéopathiques ont été utilisés pour mieux comprendre les conséquences d’un séjour prolongé dans l’espace.

Par Reza Redjem-Chibane et Nicolas Massabuau, ostéopathe

Cette étude s’est déroulée d’avril à novembre 2013 au sein de la clinique spatiale de l’hôpital Rangueil (MEDES) lors d’une campagne de simulation d’impesanteur. La méthode, couramment utilisée par le CNES (Centre National d’Études Spatiales) et l’ESA (Agence Spatiale Européenne), consiste à positionner les sujets pendant 21 jours dans un alitement prolongé avec le corps en déclive à – 6 degrés. La tête se retrouve alors environ 20 centimètres plus bas que les pieds. Cette méthode permet de simuler et d’étudier les effets physiologiques de la microgravité rencontrés au cours des vols spatiaux chez les astronautes.

osteo20-RECHERCHE-3La colonne vertébrale en impesanteur

Une vingtaine d’équipes internationales participaient à cette expérience financée par le CNES. Parmi elles, une équipe constituée du professeur Claude Gharib, chercheur à l’Université Claude Bernard (Lyon 1), et de quatre ostéopathes lyonnais : Nicolas Massabuau, Bertrand Haouy, Loïc Treffel et Elvine Nicod-Haouy. Ils ont tenté de mieux comprendre les symptômes qui affectent fréquemment les astronautes au cours de leur vol, mais surtout à leur retour : mal de dos et douleurs de type sciatique. Des examens plus complets ont également révélé une importante fréquence de hernies discales. Alors que ces douleurs ont beaucoup été étudiées, les mécanismes qui en sont à l’origine sont moins bien connus et les traitements aujourd’hui appliqués restent inefficaces. L’explication la plus logique de l’origine de ces symptômes est l’évolution de l’Homme de la quadrupédie vers la position debout. Une évolution au cours de laquelle, la résultante des forces liées à la gravité a changé de direction au niveau de l’axe principal de l’organisme. Alors que le vecteur gravitaire est perpendiculaire à la colonne vertébrale chez le quadrupède, il est vertical chez l’Homme, « écrasant » la colonne vertébrale. Pour soutenir cet axe, la structure de l’os s’est modifiée, les masses musculaires latéro-vertébrales se sont renforcées ainsi que les disques intervertébraux pour amortir les chocs liés aux déplacements.

Les conséquences physiologiques de l’impesanteur

Or, après quelques jours d’impesanteur, deux phénomènes majeurs parfaitement identifiés apparaissent : l’atrophie des muscles latéro-vertébraux (et des membres inférieurs) et, surtout, l’agrandissement des disques intervertébraux (d’environ 1 mm par disque dorsal). Cet allongement de la colonne vertébrale (de l’ordre de quelques centimètres) est également observable dans des conditions ordinaires. Ainsi, le seul fait de se coucher tous les soirs nous fait gagner quelques millimètres au cours de la nuit que nous perdons le lendemain dans la matinée. C’est pourquoi maintenir des sujets en position couchée pendant plusieurs semaines (voire des mois) permet d’observer le même allongement et les mêmes douleurs que chez les astronautes. Cet allongement a pour conséquence un étirement des muscles, des ligaments et des nerfs à l’origine de la symptomatologie (voir figure 1, ci-dessous).

Figure 1 : Évolution de la taille des disques intervertébraux en impesanteur Évolution des disques intervertébraux en position debout (à gauche) et en impesanteur (à droite). L’élargissement des disques (augmentation de taille) entraîne un étirement des muscles, des ligaments et des nerfs à l’origine de phénomènes douloureux. Source : NASA
OSCAR 1 : un bilan ostéopathique

Pour mieux comprendre ce phénomène, 12 sujets triés sur le volet ont été mis cette situation d’impesanteur. Des études métaboliques (nutritionnelles), osseuses, musculaires et cardiovasculaires ont été réalisées par les équipes scientifiques internationales du projet. Et des tests ostéopathiques ont notamment été réalisés avant et après l’alitement afin d’établir un diagnostic ostéopathique : c’est le projet OSCAR 1. Pour la première fois, une étude ostéopathique était intégrée à un ensemble d’expérimentations pluridisciplinaires. Mené par une équipe d’ostéopathes, OSCAR 1 s’appuie sur un protocole basé sur l’observation des courbures vertébrales du sujet, la mesure des grands mouvements telle que la distance main-sol, ainsi que la recherche de dysfonctions vertébrales. Les mesures ont été effectuées par deux ostéopathes différents, l’un après l’autre, et au cours de deux sessions d’alitement. La première entre avril et mai 2013. La seconde, entre septembre et novembre 2013.

Le protocole

Un interrogatoire à l’aide d’une échelle visuelle analogique a d’abord été mené par un médecin sur les douleurs rachidiennes de chacun des sujets de l’expérience. Ensuite, une analyse des courbures a été effectuée afin de déterminer les étages rachidiens présentant de potentielles anomalies de positionnement. L’adaptation en rotation et inclinaison des vertèbres sus-jacentes à cette zone a également été observée. Des photographies de face, de profil et de trois quarts dos ont été prises. Les distances main-sol lors des inclinaisons et flexions du rachis, les longueurs des segments rachidiens ainsi que les différences de hauteur entre les repères osseux du bassin ont été mesurées. Enfin, les ostéopathes ont déterminé quels étaient les étages vertébraux en restriction de mobilité. Au cours de ces tests, les sujets étaient successivement assis, en procubitus et décubitus. Les praticiens mobilisaient alors les niveaux en inclinaison et rotation en effectuant des pressions sur les épineuses et les masses latérales vertébrale.

L’ostéopathie sur orbite

Les données recueillies sont en cours de traitement et les expérimentateurs du projet OSCAR tiennent à souligner la qualité de l’accueil ainsi que le soutien du MEDES tout au long de ce projet. L’insertion d’ostéopathes au sein d’équipes de recherches médicales ayant été concluante, d’autres collaborations scientifiques devraient avoir lieu, avec la présence d’un professeur en odontologie pour explorer l’articulation temporo-mandibulaire. Étape ultime : définir un protocole thérapeutique pour traiter les symptômes des astronautes au cours de leur vol ou au retour de leur mission. À suivre.

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