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Le parcours de santé : une solution pour l’ostéopathie ?

COLLOQUE SCIENCES PO – 29 novembre 2016

Le mardi 29 novembre à Paris se déroulait un colloque coorganisé par Siences Po et l’association Ostéopathes de France (anciennement UFOF). Son thème : L’ostéopathie peut-elle trouver sa place dans un parcours de santé ? À partir de la situation actuelle, quelles sont les perspectives d’intégration de l’ostéopathie ?

Edouard Couty
Edouard Couty

Pour aborder ces problématiques, la Chaire santé de Sciences Po a organisé un séminaire consacré à la place de l’ostéopathie dans le système de santé français. Un groupe de travail a fait un état de la situation à travers des réunions et auditions de différents acteurs du secteur entre mars et juin 2016. Les conclusions ont été consignées dans un document de synthèse : La place de l’ostéopathie dans le système de santé – Enjeux et perspectives, publié dans la collection Séminaire des Éditions de santé et presse de Sciences Po.
Edouard Couty, Conseiller maître honoraire à la Cour des comptes, membre de la Chaire santé de Sciences Po, est revenu en sa qualité de président du séminaire sur ce travail questionnant la place, le rôle et la reconnaissance de l’ostéopathie auprès des professionnels de santé en France. Pour apporter des éléments de réponse, un groupe composé d’ostéopathes, notamment investis au sein d’associations professionnelles, d’un médecin-ostéopathe, de sages-femmes libérale et hospitalière, de la présidente d’une association d’usagers de l’ostéopathie, d’un médecin généraliste et d’un chirurgien orthopédique a été réuni par Edouard Couty.

Qu’est-ce qu’une profession de santé ?

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Henry Coudane

À travers l’exemple des ostéopathes, ce séminaire a donc cherché à connaître le positionnement des professions qui ne sont pas de santé dans l’univers de la santé. « Qu’est-ce qui caractérise les professions de santé ? », interroge alors Edouard Couty. « La caractéristique d’une profession de santé est d’être énumérée dans le code de la santé. Mais il n’existe pas de définition précise et légale de ce qu’est le professionnel de santé » répond aussitôt ce dernier. La définition de la santé de l’OMS (Organisme Mondial de la Santé), plus large et plus complète, fait ressortir que de nombreuses professions pourraient intégrer la liste des professions de santé du code de la santé français car elles contribuent à la santé en général.
Par ailleurs, selon l’OMS, l’ostéopathie une médecine traditionnelle et complémentaire. Au regard de ces éléments, quelle peut être la reconnaissance de l’ostéopathie par les professionnels de santé ?
Et si la réponse à cette question se trouvait dans la formation et dans la recherche universitaire ? Henry Coudane, professeur de médecine légale et droit de la santé, chirurgien des hôpitaux, doyen honoraire, chef du service arthroscopique, traumatologique et orthopédique de l’appareil locomoteur (A.T.O.L) au CHU de Nancy, a alors replacé l’Université au cœur du colloque.
Après avoir rappelé quel était le statut des Universités et des Facultés de médecine, l’ostéopathie pourrait, en changeant certaines choses, coller au système de formation universitaire. « L’ostéopathie universitaire est envisageable » déclare Henry Coudane car la formation est aujourd’hui suffisamment structurée pour intégrer le système LMD défini par le processus de Bologne. En regardant attentivement le référentiel de formation de l’ostéopathie, il donne un exemple d’adaptation possible pour coller au système LMD : renommer les « travaux dirigés» décrits dans le référentiel en « enseignements dirigés ».

Une invitation à faire de la recherche une universitaire

Stephane Brissy
Stephane Brissy

Henry Coudane invite également les ostéopathes intéressés par la recherche à intégrer les équipes d’accueil des écoles doctorales pour faire de la recherche. Car la recherche c’est la recherche clinique avant tout. Il faut des cohortes de patients et des évaluations qualitatives des soins. Avec l’utilisation des échelles de qualité de vie, l’ostéopathie a de nombreuses possibilités. « Ne soyons pas dubitatifs. Vous (NDLR : les ostéopathes) avez une richesse que j’ai découverte. Mon rôle est de vous démontrer que vous avez la possibilité d’assoir ceci sur le plan universitaire ».
Si Henry Coudane nous a fait la démonstration que l’ostéopathie pouvait être universitaire, peut-elle concrètement aujourd’hui organiser une coopération avec les professionnels de santé ? Pour Stéphane Brissy, Maître de conférences en droit privé à l’Université de Nantes, membre de l’Institut Droit et Santé de Paris Descartes, l’intégration de l’ostéopathie n’est pas aussi facile car la coordination dans un parcours de santé n’est pas uniquement dépendante des textes. La logique du code de la santé publique sur l’organisation des professions de santé est très segmentée. Hormis pour les médecins qui ont une compétence assez générale sur la prise en charge d’un patient. Pour les autres, les champs de compétences sont bien définis pour ne pas être accusés d’exercice illégal de la médecine. Comment l’ostéopathie peut-elle s’inscrire dans cette organisation segmentée des professions de santé ?

La logique du parcours de santé : une opportunité pour l’ostéopathie !

Dans le même temps, se développe la logique du parcours de santé. Cette notion est récente en droit. Il s’agit de l’aborder sous le bon angle pour rendre légitime la place de l’ostéopathie dans notre système de santé. Elle est inclusive et « quand je lis la définition de l’ostéopathie, et plus précisément son côté holistique, la coopération est évidente. Les différents rapports sur les compétences attendus d’un professionnel de l’ostéopathie décrivent la capacité d’avoir une vision globale pour se déterminer sur la prise en charge ou la réorientation d’un patient (rapport Lude 2007). Mais l’activité ostéopathique ne suppose pas l’omnipotence ».
À la lecture des textes décrivant leur activité (premiers articles des décrets de mars 2007), les ostéopathes ne peuvent agir si des examens paracliniques sont nécessaires. Avoir une vision globale et être capable de renvoyer un patient rend la coopération non pas optionnelle, mais obligatoire. Cela fait partie des droits essentiels du patient : recevoir des soins appropriés à son état de santé. Une aptitude valable pour les non-professionnels de santé comme pour les professionnels de santé. Pour ces derniers, la continuité de soins est obligatoire. Cette lecture des textes de loi s’oppose à la logique exclusive de l’organisation segmentée des professions de santé.
Mais si l’ostéopathe doit renvoyer vers le professionnel de santé, est-ce que la réciproque est obligatoire ? Au regard des textes de loi : non. Car pour faire cette réorientation, les professionnels de santé ont besoin de référentiel et de règles de bonnes pratiques. La loi de 2002 n’apporte toujours pas ces éléments d’encadrement de l’exercice de l’ostéopathie. C’est le 1er obstacle à la coopération.

Colloque Sciences-Po I 29 novembre 2016 à Paris
Colloque Sciences-Po I 29 novembre 2016 à Paris

Des dispositifs pour faciliter la collaboration entre acteurs de la santé

Depuis une dizaine d’années, un dispositif collectif incite les professionnels de santé de différentes disciplines à se regrouper dans des structures collectives. D’abord à travers un protocole de coopération (en 2009) ou chaque professionnel de santé signe de manière individuelle des contrats par lesquels il donne à un autre professionnel de santé la compétence de faire des actes qu’il réalise habituellement. Un médecin pourra par exemple confier des actes à un infirmier. La procédure pour installer cette coopération fait intervenir l’HAS et de l’ARS. Elle peut prendre plusieurs mois.
Les maisons de santé pluriprofessionnelles ont ensuite été créées pour proposer des soins de premiers recours avec pour mission l’accessibilité sociale, la coordination des soins et les actions de santé publique.
L’équipe de soin primaire (loi Touraine) dans un établissement ou en dehors est censée permettre la structuration des parcours de santé avec un projet de soin. L’idée d’ouverture est présente.
Autre structure de collaboration inter-professionnelle : les communautés territoriales de santé. Elles permettent la coopération entre professionnels de santé dans le cadre d’un projet régional de santé.

« Lorsque la logique inclusive du parcours de santé surpassera la logique exclusive des professions, la collaboration de tous les acteurs de la santé sera possible »

Une intégration plus compliquée pour les ostéopathes

Intégrer ces structures est simple pour les professionnels de santé. Pour les ostéopathes exclusifs, c’est plus compliqué car la loi distingue les ostéopathes exclusifs des ostéopathes professionnels de santé. Pour le Conseil d’État, ce n’est même pas une profession paramédicale. Conséquence : les textes qui définissent ces nouvelles collaborations interprofessionnelles ne s’intéressent pas aux non-professionnels de santé.

« La définition de la santé de l’OMS pourraient intégrer allonger la liste des professions de santé présentes dans le code de la santé français »

Mener une réflexion sur ces catégories de professionnel permettra de faire évoluer cette situation. Mais la logique de parcours de santé permet déjà de dépasser cet écueil à travers les missions mêmes des professionnels de santé et notamment celles des médecins de premier recours : « orienter les patients selon leur besoin et s’assurer de la coordination des soins ».
Or, on retrouve l’ostéopathie dans le parcours de santé décrite dans le code de la santé publique : « les professionnels vont échanger des informations entre eux dans le but d’assurer la coordination ou la continuité des soins. Les professionnels concernés par cet échange d’information sont les professionnels de santé et certaines sous-catégories de non professionnel de santé : ostéopathes, chiropraticiens, psychologues, etc.
Cette logique coopérative intégrée dans une vision plus large des professions de santé contribue à légaliser plus encore l’ostéopathie. « La logique du parcours de santé est une notion récente en droit qu’il s’agit de bien analyser pour rendre légitime la place de l’ostéopathie dans notre système de santé. Lorsque la logique inclusive de ce parcours surpassera la logique exclusive des professions, une évolution sera possible dans la collaboration de tous les acteurs de la santé », conclut Stéphane Brissy.

L’ostéopathie doit-elle devenir une profession de santé ?

Finalement, « est-ce souhaitable pour l’ostéopathie d’être une profession de santé ? » interroge Edouard Couty. Ce séminaire fait un constat de l’évolution actuelle de la profession et définit, à travers la problématique de la collaboration avec les professionnels de santé, quelques pistes de réflexion pour proposer une prospective et des pistes d’action pour l’avenir.

[su_box title= »Ostéopathes de France » box_color= »#ef5609″]renaud_leclerc_sciences-po-osteomagRenaud Leclerc, trésorier des Ostéopathes de France et secrétaire général de European Osteopaths, a ensuite abordé les questions démographiques, économiques et réglementaires de l’ostéopathie en France. Il a fait des parallèles avec les autres pays européens pour proposer de construire une Europe de l’ostéopathie dont l’approche politique, par rapport à l’approche normative actuellement mise en œuvre, serait plus à même de construire la profession d’ostéopathe.

dominique-blanc_sciences-po-osteomagDominique Blanc, président des Ostéopathes de France, a présenté les résultats du sondage IFOP 2016 sur Les profils des patients de l’ostéopathie. Des résultats que vous pouvez retrouver dans notre article : Ostéopathe, je t’aime… un peu, à la folie, passionnément ! (en accès libre !) . Dominique Blanc a terminé son discours en revenant sur la loi de Santé de Marisol Touraine en faveur notamment de la prévention.Une porte ouverte sur l’ostéopathie… [/su_box]

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Ostéopathe, je t’aime… un peu, à la folie, passionnément !

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