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Recherche, ostéopathie & pédiatrie

L’année 2013 a été prolifique en études autour de la périnatalité et de la pédiatrie. Voici une sélection de quelques études récentes, analysées et commentées

Par Marjolaine Dey, ostéopathe DO

Publié en Novembre 2014 dans L’Ostéopathe Magazine #20

Déformations du crâne du nourrisson : le discours de la méthode 

Cette étude clinique publiée en juin 2013 s’intéresse à la déformation crânienne du nourrisson. Son objectif : étudier l’efficacité d’une méthode d’étirements réalisée par les parents et l’utilisation quotidienne d’un oreiller spécifique de puériculture. Les auteurs proposent une étude avec une méthodologie rigoureuse, car ils citent dans leur introduction plusieurs autres articles publiés prouvant l’efficacité de ces deux méthodes, mais avec un niveau de preuve très bas. Afin de prouver qu’une méthode fonctionne, les chercheurs doivent mettre en place des protocoles expérimentaux stricts, reproductibles et respectant une méthodologie spécifique, afin de publier dans de grandes revues scientifiques. Lorsque plusieurs articles de bonne qualité ont été publiés, il est possible de tirer des conclusions en synthétisant les résultats des différents auteurs. Cet effort méthodologique est donc nécessaire pour alimenter les revues de littératures qui servent à prouver l’efficacité d’une méthode. Les auteurs ont mis en place une étude randomisée prospective et validée par un comité éthique. Sans titreLe comité éthique permet de valider que le protocole respecte les principes d’éthique et de déontologie. Aucun article clinique n’est aujourd’hui publié si son protocole n’a pas été validé en amont. Les critères de jugement utilisés étaient objectifs et réalisés par un clinicien non impliqué dans l’étude et qui ne savait pas dans quel groupe les bébés seraient randomisés. Le crâne a été mesuré dans tous les sens : longueur, largeur et diagonales transcrâniennes et selon un protocole international publié. En tout, cinquante bébés ont été recrutés âgés de 5 mois ou moins et présentant une déformation du crâne, mais sans craniosténose définitive. 25 bébés ont été randomisés dans le groupe test de l’oreiller. Les parents ont reçu une brève formation sur l’utilisation de l’oreiller, qui devait être utilisé exclusivement sur la période d’étude de 6 mois. L’année 2013 a été prolifique en études autour de la périnatalité et de la pédiatrie. Voici une sélection de quelques études récentes, analysées et commentées. Par Marjolaine Dey, ostéopathe DO Recherche, ostéopathie & pédiatrie À travers sa revue de presse, Marjolaine Dey réalise une veille scientifique sur une dizaine de revues médicales et ostéopathiques. Elle sélectionne ainsi pour L’ostéopathe magazine des articles novateurs et apporte son regard critique sur ces recherches.

Les 25 autres bébés ont été affectés au groupe d’étirements : des physiothérapeutes ont enseigné aux parents comment étirer les cervicales en flexion latérale et rotation, de chaque côté, au moins 5 fois par jour. Les parents devaient également positionner leur bébé sur le ventre lors des périodes d’éveil.

Sans titreAu total, les données de 42 bébés qui ont suivi les différentes étapes de l’étude ont pu être analysées. Les résultats des deux groupes étaient significatifs. Les étirements et l’oreiller semblaient donc efficaces dans la prise en charge de déformation crânienne, chez des nourrissons de moins de 5 mois. Les auteurs concluent également que l’utilisation de l’oreiller semblerait plus facile à mettre en place que les étirements réalisés par les parents.

Wilbrand JF, Seidl M, Wilbrand M, Streckbein P, Böttger S, Pons-Kuehnemann J, Hahn A, Howaldt HP. A prospective randomized trial on preventative methods for positional head deformity: physiotherapy versus a positioning pillow. The Journal of Pediatrics 2013;162(26):1217-1221

Une preuve mesurée

Cet article cite une étude pilote prospective ostéopathique réalisée en 2011 au Canada. Elle porte sur 12 nourrissons de moins de 6,5 mois, suivis pendant 8 semaines et ayant bénéficié de 4 séances de traitement. Les critères de jugements sont anthropométriques, plagiocéphalométriques et qualitatifs.

Cette étude motiverait d’autres études à plus grande échelle

Les auteurs confirment l’hypothèse que la prise en charge ostéopathique serait bénéfique dans la prise en charge du nourrisson de moins de 6,5 mois ayant une asymétrie positionnelle du crâne. Cette
étude motiverait d’autres études à plus grande échelle, avec plusieurs groupes afin d’obtenir des preuves de meilleure qualité. Des conclusions qui remettent en question le texte de loi limitant les ostéopathes de France à prendre en charge un nourrisson de moins de 6 mois, étant donné qu’une prise en charge précoce serait la clé de la réussite. Lessard S, et al., Exploring the impact of osteopathic treatment on cranial asymmetries associated with nonsynostotic plagiocephaly in infants, Complementary Therapies in Clinical Practice (2011), doi:10.1016/j. ctcp.2011.02.001

Revue de littérature : plutôt pour, mais sans pouvoir conclure…

Deux revues de littérature ont été publiées sur la thérapie manuelle chez les enfants. La première, celle de Pepino VC et al., conclut que la thérapie manuelle (dont l’ostéopathie) est efficace dans la prise en charge des maladies respiratoires de l’enfant. La seconde, celle de Posadzki P et al., que les niveaux de preuve ne sont pas suffisants pour conclure. Pourquoi ces différences ? D’abord dans l’analyse de la méthodologie (voir tableau ci-dessous)

tableau

Si les articles publiés montrent dans leur majorité que l’ostéopathie semble avoir un effet positif, avec peu d’effets indésirables, leur qualité méthodologique ne permettrait pas de conclure. En effet, les articles en ostéopathie souffrent tous du même problème : pas assez de budgets. Lorsqu’un ostéopathe découvre une petite étude avec des conclusions cliniques optimistes, mais des calculs statistiques non significatifs, il reste optimiste. Un scientifique regardera la même étude et conclura qu’il ne peut pas conclure. L’objectivité est importante, autant de la part des ostéopathes qui ont tendance à sauter sur des conclusions un peu hâtives que de la part des détracteurs de l’ostéopathie qui préfèrent conclure à partir d’une étude à faible niveau de preuve que l’ostéopathie n’est pas efficace. L’étude de Posadzki et al. est ainsi utilisée par certains détracteurs de l’ostéopathie afin de décrédibiliser l’approche ostéopathique chez les enfants, notamment dans la dernière émission « Allo Docteur » sur France 5. L’objectivité encore et toujours reste le meilleur argument des ostéopathes.                                                                                        Pepino VC, Ribeiro JD, de Olieira Ribeiro MAG, de Norhonha M, Mezzacappa MA, Santo Schivinski CI. Manual therapy for childhood respiratory disease : a systematic review. Journal of Manipulative and Physiological Therapeutics 2013;36(1):57-65 Posadzki P, Lee MS, Ernst E. Osteopathic Manipulative treatment for pediatric conditions: a systematic review. Pediatrics 2013 Jul; 132(1):140-52

Que disent les spécialistes ?

Une revue de la littérature publiée en 2013 a étudié la prise en charge non chirurgicale de la plagiocéphalie postérieure positionnelle en comparant l’appareillage orthétique (casque) avec un programme de repositionnement. Elle porte sur 11 articles et 6 revues de la littérature et a été publiée dans une revue à haut niveau de preuve. Plusieurs types d’orthèses crâniennes semblaient aboutir à des corrections plus importantes et plus rapides que les protocoles de repositionnements. L’auteur précise que les études ont été réalisées sur de petits groupes d’enfants, avec des critères d’évaluation différents qui ne permettent pas de comparer les études entre elles. Les groupes sont rarement randomisés et ce sont souvent les parents qui choisissent les modalités de traitement. Il est en effet difficile d’imposer aux parents des choix de prise en charge de leur enfant.

Certaines études sont sponsorisées par des appareilleurs orthopédiques qui ont tout intérêt à prouver que leurs méthodes fonctionnent

Les parents et les médecins sachant dans quel groupe est chaque enfant et s’il porte un casque ou non, le double aveugle et le placébo sont impossibles. De plus, l’auteur souligne que certaines études sont sponsorisées par des appareilleurs orthopédiques qui ont tout intérêt à prouver que leurs méthodes fonctionnent. Enfin, l’évolution naturelle de la plagiocéphalie postérieure positionnelle n’est pas connue et semble différer grandement selon les cas. Il est ainsi difficile de comparer l’efficacité de chaque méthode. Une clarification des méthodes d’évaluation et des indications de traitement ainsi que des évaluations des risques et du maintien de l’efficacité à plus long terme seront nécessaires. Cela est rassurant de voir que les ostéopathes ne sont pas les seuls à rencontrer des difficultés méthodologiques de taille : la qualité n’est pas toujours au rendez-vous, malgré le « haut niveau de preuve » demandé par les revues scientifiques. Nous, ostéopathes, ne pouvons offrir d’alternatives ou de techniques complémentaires, tant que la médecine conventionnelle n’aura pas publié plus sur le sujet.

Non-surgical management of posterior positional plagiocephaly : orthotics versus repositioning. Paquereau J. Annals of Physical and Rehabilitation Medicine 2013;56:231-249

[su_note note_color= »##ef5602″ text_color= »#040404″]Une revue de presse scientifique internationale

Voici la liste des principales revues scientifiques consultées pour cette revue de presse :

  • International Journal of Osteopathic Medicine
  • Journal of Bodywork & Movement Therapies
  • Clinical Biomechanics
  • Manual Therapy
  • Journal of Manipulative & Physiological Therapeutics
  • The Spine Journal
  • Spine
  • Journal of the American Osteopathic Association[/su_note]

Autisme et prise en charge ostéopathique

Après le congrès ICAOR (International Conference on Advances in Osteopathic Research) de 2012 à Londres, le résumé d’une étude a été publié dans l’IJOM. Ses auteurs s’étaient penchés sur les problèmes intestinaux fréquemment rencontrés chez les enfants autistes, notamment des douleurs abdominales, des diarrhées et des ballonnements. Cette étude prospective portait sur 49 enfants autistes de 3 à 8 ans ayant des troubles gastro-intestinaux. Pendant 6 semaines, ils ont bénéficié de 6 séances d’ostéopathie viscérale hebdomadaire de 30 minutes chacune. Le traitement était constitué de techniques adaptées à chaque enfant et l’évaluation était subjective grâce à des questionnaires remplis par les parents. Les analyses statistiques montrent des résultats significatifs, notamment sur les symptômes gastro-intestinaux : vomissements (p<0,00029), appétit (p=0,039), ainsi que sur des notions relationnelles à savoir, est-ce que les enfants regardaient plus facilement leurs parents dans les yeux (p=0,035). Les conclusions des auteurs sont simples : elles donnent une piste pour une prise en charge d’enfants autistes ayant des troubles intestinaux. Mais cette étude ne permet pas de conclure à plus grande échelle.

Castellarin IB, Drysdale I, Patel V. Evaluation of behavioural and gastrointestinal symptoms in autistic children after visceral osteopathic treatment 2013;16:e13-e14

Approche ostéopathique de la jaunisse du nourrisson

Cet article offre une standardisation des techniques de massage destinées au nouveau-né. Le massage permettrait d’améliorer l’excrétion de la bilirubine diminuant ainsi la durée d’hospitalisation des bébés touchés. L’étude propose un protocole de massage à réaliser par les parents, de manière quotidienne, afin de réduire les risques associés à la jaunisse. Les auteurs soulignent l’importance de la prise en charge par les parents, car il semblerait qu’aux États-Unis, la majorité des mères et leur nouveau-né sortent de l’hôpital 30 heures après l’accouchement.Sans titre La jaunisse se développant parfois quelques jours après la naissance, les jeunes parents ne se rendent pas compte du danger associé à une jaunisse non soignée et tardent à ramener leur bébé à l’hôpital.
La jaunisse est donc à l’origine de nombreuses hospitalisations néo-natales. Les auteurs indiquent que le massage est un moyen efficace pour créer des liens entre parents et bébés. Il permet de réduire des symptômes gastro-intestinaux gênants et améliore la qualité du sommeil des nourrissons. De plus, ces techniques sont peu coûteuses à enseigner, ne présentent pas d’effets indésirables et de nombreux articles publiés prouvent leur efficacité. Les techniques s’appellent : Techniques de massage de bienvenue du nouveau-né. Elles ont été mises en place par une association américaine World Institute for Nurturing Communication (www.winc.ws) et semblent avoir une vocation plutôt humanitaire, mais également commerciale : pour une poignée de dollars et une formation par e-learning, vous aussi vous pouvez devenir masseur de bébé et enseigner les massages aux jeunes parents. Il n’y a pas de conflits d’intérêts notés dans l’article, même s’il donne un bon coup de pub à cette association.

L’article évoque une étude japonaise réalisée par Chen et al. (2011). Il s’agit d’un essai clinique contrôlé semi-randomisé sur l’action du massage du nouveau-né né à terme portant sur deux groupes : groupe traité (n=20) par massage (2 fois 15 minutes par jour de la naissance au 5e jour de vie, par du personnel hospitalier formé au massage) et un groupe contrôle (n=22). Les indicateurs utilisés ont été : poids, fréquence des selles, taux de bilirubine transcutané et taux de bilirubine dans le sang (mesuré le 4e jour). Les calculs statistiques montrent que tous les indicateurs ont évolué de manière significative dans le groupe massage, par rapport au groupe contrôle (p<0,05). Les auteurs avancent l’hypothèse que le massage a favorisé le passage des selles de méconium, excrétant ainsi une grande partie de bilirubine et prévenant donc l’apparition de la jaunisse. Les auteurs concluent que d’autres études à plus grande échelle doivent être mises en place. En attendant, ils conseillent à tous les parents d’adopter quelques gestes de massage afin d’aider le nouveauné dans ses premiers jours de vie.

Click R, Dahl-Smith J, Fowler L, DuBose J, Deneau-Saxton M, Herbert J. An osteopathic approach to reduction of readmissions for neonatal jaundice. Osteopathic Family Physician 2013:5;17-23 Chen J, Sadakata M, Ishida M, Sekizuka N, Sayama M. Baby massage ameliorates neonatal jaundice in full-term newborn infants. Tohoku J Exp Med 2011;223:97-102

Étude d’un cas : prise en charge d’un nouveau- né de 12 jours ayant une déformation congénitale en talipes equinovarus bilatéral.

Cette étude italienne présente une prise en charge ostéopathique d’un nouveau-né en complémentarité du traitement orthopédique. Le chirurgien orthopédique avait prévu 3 séries de plâtres, afin de corriger la déformation. L’ostéopathe a réalisé 4 séances pendant les 4 premières semaines de vie. Au jour 33, l’orthopédiste a conclu que la dernière série de plâtre ne serait pas nécessaire, car ses pieds étaient à nouveau dans la norme. Conclusion des auteurs : la prise en charge en ostéopathie aurait permis une résolution plus rapide que l’histoire naturelle de la maladie et donc un traitement moins lourd et contraignant pour le petit patient. Dans cet article, l’organisation a lieu comme suit :

tableau-2

Le protocole mis en place n’est pas très clair. Cet article semble avoir été écrit de manière rétrospective, même si ce n’est pas clairement indiqué. Ce genre de recherche est intéressant, mais reste anecdotique, car il montre que l’ostéopathe pourrait avoir un rôle dans la prise en charge de déformations orthopédiques congénitales, mais ici seul un patient est pris en charge. Quoi qu’il en soit, il n’est qu’une piste pour guider les ostéopathes vers l’éventuel accompagnement de nouveau-nés qui présenteraient ce type de déformation. La prochaine étape serait de rédiger un protocole de recherche, de le mettre en place dans une étude pilote de petite taille, puis de réaliser une étude à grande échelle. Elda Andreoli et al. Osteopathie manipulative treatment of congenital talipes quinovarus : a case report. j of Bodywork and Movement Therapies. 2013

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